Xavier Matthieu était heureux et ému en sortant de l'audience.
Les six ouvriers de l'usine Continental de Clairoix, qui avaient écopé en première instance de peines de prison avec sursis pour le saccage de lasous-préfecture de Compiègne en 2009, ont été condamnés vendredi à de simples peines d'amendes par la cour d'appel d'Amiens. Ils attendaient l'arrêt de la cour d'appel depuis la mi janvier.
Le délégué CGT Xavier Mathieu, figure emblématique de la lutte des Conti, est sorti le poing levé du Palais de Justice, acclamé par une centaine de manifestants.
L'avocat général avait requis des peines de deux à cinq mois de prison avec sursis, quasi équivalentes aux peines prononcées en première instance le 1er septembre par le tribunal correctionnel de Compiègne.
La cour a déclaré les six prévenus coupables de «dégradation de bien destiné à l'utilité publique». M. Mathieu a été condamné à 4.000 euros d'amende, tandis que ses cinq coprévenus ont écopé de 2.000 euros d'amende chacun.
«On considère ça comme une relaxe, on est heureux, soulagé», a déclaré le syndicaliste à la presse, avant de qualifier un peu plus tard cette décision de «victoire».
«C'est la fierté de la classe ouvrière qui a été relaxée», a-t-il estimé, remerciant l'ensemble des responsables politiques de gauche et les syndicalistes qui les ont soutenus.
Casting de Gauche
Lors de l'audience du 13 janvier, de nombreuses personnalités de gauche s'étaient succédées à la barre en tant que «témoins de moralité»: Marie-George Buffet (PCF), Nathalie Arthaud (LO), Olivier Besancenot (NPA), Cécile Duflot (Verts), Benoît Hamon (PS) et Jean-Luc Mélenchon (Parti de gauche).
«C'est vraiment une victoire de travailleurs», s'est réjouie sur les marches du palais l'ancienne porte-parole de Lutte Ouvrière Arlette Laguillier, en appelant à la «solidarité ouvrière» pour payer les amendes, ce qui sera le cas, selon M. Mathieu.
Pour le porte-parole du NPA, Olivier Besancenot, l'absence de peine de prison, qui «fait chaud au coeur», constitue un «encouragement pour tous ceux qui luttent, qui résistent et ne lâchent pas».
Dans un communiqué, le porte-parole du PS Benoît Hamon a salué la décision de la cour d'appel, tandis que la secrétaire nationale du PCF Marie-George Buffet a estimé que «la lutte paie».
«Aujourd'hui, on a quasiment obtenu ce qu'on était venu chercher», a déclaré au micro Xavier Mathieu, avant de dire à tort, dans un lapsus, qu'il avait été condamné à quatre mois de prison avec sursis.
Une déclaration de culpabilité qui n'aurait pas dû être
Le syndicaliste a au passage envoyé une pique au président Nicolas Sarkozy, qui a, selon lui, «quelques crochets de bouchers tout neufs. Il (ne) les utilisera pas pour nous !» L'avocate des Conti, Me Marie-Laure Dufresne-Castets, a toutefois déploré «une déclaration de culpabilité qui n'aurait pas dû être», dénonçant un «procès politique».
Seul hic, selon Xavier Mathieu, les six Conti devraient être poursuivis au civil une fois que l'Etat aura chiffré les dégâts pour demander des dommages et intérêts.
Le 21 avril, quelque 200 ouvriers de l'usine de Clairoix avaient laissé éclater leur colère dans les locaux de la sous-préfecture de Compiègne après avoir appris le rejet par la justice de leur demande d'annulation du plan social.
La lutte des ouvriers de Clairoix, ponctuée d'une trentaine de manifestations en quatre mois, s'était soldée par l'obtention de 50.000 euros d'indemnités de départ extra-légales par salarié.
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